Pesticides: le Parlement ignore les signes du temps
Aujourd’hui, le Conseil national a rejeté sans contre-proposition l’initiative pour l’eau potable et celle pour une Suisse sans pesticides synthétiques. La contre-proposition aurait rendu juridiquement contraignant le Plan d'action sur les produits phytosanitaires, mais le Parlement a raté cette occasion.
Le lobby des agriculteurs, soutenu par les politiciens bourgeois, a rejeté jeudi toutes les contre-propositions aux deux initiatives sur les pesticides. La contre-proposition la plus prometteuse aurait rendu juridiquement contraignant le Plan d'action sur les produits phytosanitaires, mais même cela n'a pas été soutenu par une majorité.
Markus Ritter, président de l’Union suisse des paysans (USP), était en première ligne pour combattre les contre-propositions. Par le passé, l’USP s'était pourtant toujours prononcée en faveur de la mise en œuvre du Plan d'action. Néanmoins, il a résisté au caractère juridiquement contraignant. «L’USP
ne veut pas d’une mise en œuvre rapide et efficace du Plan d’action des produits phytosanitaires, contrairement à ce qu’elle prétend», affirme Eva Wyss, spécialiste en agriculture au WWF Suisse. Dans le cadre de la procédure de consultation sur la nouvelle politique agricole (PA22+), l’USP avait déjà refusé que des mesures supplémentaires soient prises en vue de réduire la charge en pesticides.
Opportunité manquée
Le Conseil national a manqué une grande opportunité. Le succès rencontré lors de la récolte de signatures pour les deux initiatives contre les pesticides ainsi qu’un sondage du WWF montrent clairement que la population ne veut pas de pesticides dans l’eau. De nombreux jeunes partis réclament à l’unisson des mesures rapides pour garantir nos bases existentielles à l’avenir. En outre, les spécialistes de l’approvisionnement en eau potable, les associations de pêcheurs, d’apiculteurs et de petits paysans, ainsi que Bio Suisse et les scientifiques sont tous d’accord sur la nécessité d’agir.
La nature, l’environnement et l’eau potable doivent être protégés des pesticides très toxiques. Il s’agit de la seule solution pour mettre un terme à la disparition des insectes et pour éviter que les sols et les cours d’eau continuent d’être pollués par des pesticides hautement nocifs. «La population attend un changement de direction clair dans l’agriculture, et celui-ci est urgent», martèle Eva Wyss. Un plan d’action plus contraignant aurait été un premier pas dans la bonne direction.
Encadré
Le plan d’action
Le Plan d’action pour les produits phytosanitaires adopté par le Conseil fédéral en septembre 2017 contient des mesures visant à réduire l’utilisation des pesticides. Il n’est toutefois pas juridiquement contraignant. Une contre-proposition aux initiatives contre les pesticides devait changer les choses. Aujourd’hui, le Conseil national a malgré tout décidé de la rejeter.
Contact:
Eva Wyss, spécialiste en agriculture, WWF Suisse, eva.wyss@wwf.ch, tél. 079 352 09 47